C’est une année exceptionnelle que décrit le rapport 2016 du Conseil de Déontologie Journalistique de Belgique francophone et germanophone (il existe deux conseils de presse en Belgique, un pour les médias de langue flamande, et le CDJ, tous deux compétents pour l’ensemble des médias écrits, audiovisuels et numériques de leur zone linguistique). Davantage de saisines par le public, davantage de plaintes retenues et traitées, une présence en hausse des médias numériques dans la liste des organes de presse mis en cause à tort ou à raison. Il faut y voir, comme les rapporteurs, la preuve de l’installation dans le paysage public de Belgique de cet organe d’autorégulation.
Que plus de 1000 personnes (rapporté à la population française, cela représenterait 15000 saisines) , choquées par la façon dont avait été traité l’arrivée de migrants sur les cotes belges, aient pensé à saisir le CDJ montre que c’est devenu un réflexe 8 ans après sa création. Une partie de la population ne se contente plus de pester contre ce qui ne lui plait pas ou qu’elle ne comprend pas, mais choisit de poser le débat devant une instance reconnue. Les préoccupations du public exprimées dans ces plaintes traduisent une exigence d’exactitude et un refus de la vérité alternative vantée par certains. »Le conseil est perçu comme un moyen d’améliorer
les pratiques professionnelles, de renouer avec les publics, de restaurer la confiance » rappelle dans sa présentation du rapport la secrétaire générale du CDJ, Muriel Hanot.
Un CSA incompétent sur les questions de déontologie de l’information
On lira donc avec intérêt le compte rendu d’une année d’activité au service de l’information et du public, et au delà des statistiques, les résumés des décisions rendues , qui dessinent une jurisprudence. On se reportera également à la présentation des outils développés par le CDJ vers les rédactions et les journalistes comme vers le public. La « stigmatisation » de certaines populations a été au cœur de plusieurs dossiers: le CDJ republie en annexe dans ce rapport la « Recommandation pour l’information relative aux personnes étrangères ou d’origine étrangère, et aux thèmes assimilés » édictée en 2016
Enfin, le rapport conjoint Conseil de déontologie journalistique / Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, publié le même jour, traduit la répartition des rôles entre un régulateur économique et administratif de l’audiovisuel et une instance déontologique compétente pour l’information délivrée par tous les médias, sur la base d’un code de bonnes pratiques uniques. 20 plaintes initialement adressées au CSA ont été transférées au CDJ en 2016. Le CDJ rend alors un avis fondé sur le respect de la déontologie journalistique. Le CSA se prononce éventuellement ensuite sur base de la législation audiovisuelle. Dans ce rapport conjoint, on lit aussi ce rappel des bonnes pratiques : « le CSA a relayé un message de la police qui recommandait aux journalistes « d’être vigilants dans la diffusion d’informations » potentiellement sensibles. Le CDJ rappelle que selon l’article 11 du Code de déontologie, « Les journalistes préservent leur indépendance et refusent toute pression. Ils n’acceptent d’instructions que des responsables de leur rédaction ». Dans le type de situation évoqué, il revient donc à la police de s’adresser directement aux rédactions, lesquelles jugeront, au cas par cas, et selon les motivations invoquées, de l’opportunité de diffuser ou non une information. PG.
lire les rapports du Conseil de Déontologie Journalistique belge ici