Note de lecture
« Les Médias face au terrorisme ». C’est le titre d’un petit ouvrage publié au début de l’année par l’Unesco et passé plutôt inaperçu. Son sous titre » Manuel pour les journaliste » dit pourtant bien son ambition : aider les journalistes à faire face professionnellement et déontologiquement aux événements « terroristes ».
L’ouvrage se veut très concret et pratique. Mais il n’évite pas les questions éthiques et philosophiques que posent aux rédactions la couverture du terrorisme. Celle-ci par exemple, qui n’est pas la plus débattue : faut il être d’abord journaliste ou secouriste ? Ou plus classiquement : comment maitriser la tonalité de son media pour éviter que « la peur contribue à diviser la société » ? Ou encore lorsque « le choc des attentats s’est estompé », s’obliger « à sortir du cadrage fusionnel ou patriotique » et intégrer une plus grande diversité de regards et d’opinion. Des choix éditoriaux qui permettent de « sortir du cadrage » sont suggérés : exposer le parcours et la personnalité des auteurs d’attentats, expliquer les causes profondes du terrorisme,ne pas se limiter au terrorisme qui frappe son public immédiat,ne pas négliger les pertes civiles provoquées par les ripostes militaires.
L’auteur, le journaliste et essayiste belge Paul Marthoz, a rencontré de nombreux professionnels et chercheurs et dépouillé une vaste documentation. Il en tire des règles de base pour la couverture des actes terroristes , où dominent la prudence , une éthique du respect , une attention aux mots employés et bien sûr aux images diffusées. Ce manuel propose aussi une réflexion concrète sur la sécurité des journalistes, facteur parfois pas assez pris en compte.
Un des chapitres les plus intéressants est celui consacré aux interactions avec les terroristes. Quand et comment visiter les zones qu’ils contrôlent, rendre compte de leurs communiqués, voire les interviewer ? L’équilibre est à rechercher entre le risque de devenir un élément de la tactique terroriste et le droit qu’ont les citoyens d’avoir accès à tous les aspects de la réalité pour juger des événements, y compris des politiques et des mécanismes de sécurité. Quand l’émotion est retombée, les journalistes ont en tout cas un droit et un devoir d’inventaire sur le rôle de chacun, en amont et pendant la crise terroriste. Y compris sur leur propres choix, impasses, aveuglements et a priori, car, écrit Paul Marthoz, « le terrorisme par sa violence, par ses conséquences, par les controverses qu’il suscite , est un révélateur du journalisme ». PG
L’ouvrage est disponible via le Service de presse de l’UNESCO, –